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Archives expositions personnelles (D)

Exposition du 16 juin au 9 novembre 2011. Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement de Haute-Savoie, 2 ter avenue de Brogny - 74000 Annecy. Tél.: +33 (0)4 50 88 21 12. Ouverture du lundi au vendredi de 14h à 18h.

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Architecture & matières - Invitée : Monique Deyres

Les Murs…, suite du texte de Huguette Botet, 2011


[...] Au CAUE Monique Deyres a abandonné ses murs fragiles pour édifier deux murs compacts, massifs, sans ouverture, installés en équerre. Hauts de 1.90 mètres et 2.50,  larges de 3 mètres et d’une épaisseur de 30 cm. Elle a collé des deux cotês des murs un millier de photos recadrées en format de brique en laissant un joint gris clair d’un centimètre et demi.

En arrivant dans la salle d’exposition on bute pratiquement sur un mur coloré avec des graduations gris-bleu-vert qui s’adoucissent pour passer du jaune à l’orange. L’oeil est agréablement surpris, sans se fixer.

L’accumulation d’images, leur proximité donne une densité telle aux murs qu’ils s’affirment séparation, obstacle même. Nous nous trouvons à l’extérieur, comme exclus d’une vie cachée. Pour éviter l’affrontement obstiné. l’autre, écho de nos forteresses intérieures, nous longeons les murs, contournons l’obstacle. Nous sommes dans une déambulation avant d’atteindre la face cachée du mur.


Derrière le mur, le coin nous attend. Tout coin dans une maison est une chambre, espace réduit où

l’on aime se blottir, se ramasser sur soi-même. Ici le coin est comme deux bras ouverts qui accueillent l’entrant. C’est le lieu d’intimité retrouvée, nul besoin d’échapper, c’est au contraire l’immobilité qui s’installe : une pause dans . la paume du repos . Le temps s’arrête, on habite le lieu. Le resserrement du coin où l’imaginaire règne, agrandit l’espace. A cet instant le vide et le plein sont réconciliés. Ce lieu d’intimité apprivoise l’infini et Bachelard écrira  «  c’est dans la concentration la plus grande de l’espace que la dialectique du dedans dehors prend toute sa force ».


Pour chacun l’expérience de la dualité de dedans dehors est dynamique et vivifiante. Ces murs-forteresse dressés par l’artiste ont le même pouvoir que ses voiles suspendus, murs symboliques qui avec tant de légèreté nous font passer du dedans dehors dans un rythme vital.


C’est seulement dans ce repos immobile propice à la contemplation que notre oeil s’arrête sur les photos. L’esprit flottant nous abordons l’oeuvre, ce n’est pas le mur opposition ni le mur rassurant que nous contemplons mais des centaines de photos perçues comme une seule note en suspension. Peu à peu l’attention s’aiguise, sollicitée par les images. Toutes parlent de nature : terres, herbes, fleurs, fruits, ombelles et branches, racines et tiges présentées en séries, en alignements, en enroulements, en enchevêtrements. Il y a une rigueur étonnante dans cette accumulation. En dépit de leur diversité, chaque photo pourrait être un mur. Cette redondance est voulue. L’essentiel est dit qui nous rappelle que niche ou cabane, maison ou palais, temple ou coin pour rêver s’édifient avec ce qu’il y a de plus riche en nous : l’imaginaire.


Ces murs sont des pages d’écriture pour nous raconter ses essais, ses découvertes, ses attentes, ses créations. Tous ces flashs sont autant d’alvéoles d’instants livrés en vrac, dans le plus grand désordre, ils ne nous donnent pas l’impression d’une durée et cependant en face de l’oeuvre c’est un entour, une atmosphère que l’on habite où l’on respire sans notion de temps. Tous ces souvenirs accumulés ne sont pas mémoire mais vie unifiée à laquelle nous participons.

Cette authenticité révélée est le fruit d’une exigence dans son art où loin des modes elle suit une trace étroite. Sa vie dans les différentes régions de France, et aussi au Mexique, en Hongrie, en Suède où elle a vécu plusieurs années, a été dictée par la nécessité impérieuse d’habiter un territoire, d’être présente aux lieux. Cette proximité recherchée tissait des liens très forts avec le végétal. La connivence entretenue par une observation minutieuse et son humilité qui abolit les frontières, lui ont ouvert le monde végétal. Elle a retrouvé la relation biologique entre la plante et l’homme et rejoint l’universel.


Cette vie est le reflet de deux mondes qu’elle a apprivoisés, unissant intérieur-extérieur. Son atelier prolongement de la maison est le coeur de cette symbiose. Tout y parle de la nature qui entre par les grandes vitres claires, les vitres sont toujours un leurre  qui ne lui suffit pas, elle a besoin des va et vient du jardin à l’atelier ; le rituel par exemple du ramassage des pommes sous le pommier chaque matin, alignées par ses soins en rangs serrés sur le sol, ce sont aussi les fragrances qui s’attachent à ses pas : romarin, basilic et iris, citronnelle et menthe, santoline et verveine, thym et marjolaine, et envahissent l’atelier aux premières chaleurs. En hiver l’oreille exercée par la pousse de ses germinations reconnaît l’avancée lente et muette des racines dans la terre lourde, ses brassées de  fleurs et de feuilles cueillies au jardin seront sublim.es par empreintes, dessins, sculptures. Ses mains agiles minutieusement trient, conservent, dessinent et le rythme de ces menus travaux l’aide à se concentrer,à se recentrer dans le coin de l’atelier, toute à cet humble compagnonnage avec le végétal pendant que se jouent inconsciemment la rencontre des espaces, le temps recomposé et le chemin obscur de la création.


Jardins verticaux, enchâssement de fleurs et de feuilles dans des dalles de cire, murs de soie, envolées de végétaux broyés, de cendres, de terres et pollens, lignes de germinations, dentelles de lichens, vitrail de mémoires vives, arabesques des lianes, ferronneries légères de physalis, saga des pommes… nous font rêver et nous apprennent à vivre ouverts à la nature et cultivant le temps des

songes à l’abri des murs.

Ainsi saurons nous d’une poussière élever des cathédrales, construire des usines de vent et de nuages et donner à la vie le vert des paradis.

   Architecture & matières - Invitée : Monique Deyres
   CAUE d’Annecy - du 16 juin au 9 novembre 2011

  Les Murs, suite du texte de Huguette Botet

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Les Murs, suite du texte de Huguette Botet