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Communiqué de presse


Pour son intervention à La Maréchalerie, Didier Courbot a installé un fragment de pont à l’échelle 1 dans l’espace d’exposition. Maquette sur-dimensionnée faite de bois et de carton gris, elle n’apparaît pas au premier regard. Monumentale et pourtant invisible, on se demande où est l’oeuvre. Qu’y a t’il à voir ? Ce qu’il y a à voir, c’est tout d’abord le lieu que l’oeuvre s’attache à révéler, à définir. Comme pour son installation Seven diamonds dans le parc de la Tokachi Millennium Forest au Japon – il y a abandonné secrètement sept diamants, attirant ainsi le regard sur le paysage en le transformant en boîte à bijoux – c’est le lien entre l’action de l’artiste et le lieu qui fait sens et non l’oeuvre en elle-même.


Didier Courbot qualifie La Maréchalerie d’espace ambigu, résiduel. Lieu de passage et de transition, le centre d’art s’appréhende difficilement, à la frontière entre la partie contemporaine de la ville de Versailles et le site patrimonial du château. Le pilier de pont et son tablier ressemblent à des vestiges d’une ancienne autoroute menant au château et à ses jardins. Trait d’union entre ces deux composantes urbaines – le moderne et l’ancien – l’intervention de l’artiste transforme La Maréchalerie en un point de rencontre, créant sous le pont autoroutier un nouvel espace dans cet espace existant et appelle à un voyage immobile dont la ville serait le paysage.






L’oeuvre par le vide


Quel est cet objet en carton dont les formes sont familières, rassurantes de solidité et qui ici semble si parfaitement incongru ? Un élément du paysage urbain : un morceau de pont routier avec sa pile et son tablier. Si le visiteur, qui entre par la cour de l’école, ne voit pas au premier regard cette forme monumentale posée dans un coin, c’est peut-être que l’oeuvre n’est pas là.


Ce que l’on voit en premier c’est le lieu, car c’est lui qui est donné à voir par cet objet qui reconfigure l’espace. Il jouxte la petite salle adjacente et semble implanté en elle tant l’énorme pied s’avance dans l’ouverture de la porte. Reconfigurer un espace, le rendre visible c’est la proposition de Didier Courbot à La Maréchalerie. La salle n’est plus un espace indéterminé en attente d’oeuvre mais un espace suffisant révélé par l’intervention.



Collage contre collages


Pile et tablier sont les deux éléments qui composent les ponts routiers, ils rythment les paysages ordinaires de ville ou de campagne. Ici ils forment un collage qui répond à une histoire particulière du bâtiment, ancien lieu de passage et lieu récent d’un collage architectural : la façade pavillonnaire (19ème) et la façade à l’arcade déplacée depuis les anciens manèges (17éme).


Collage contre collages, Didier Courbot soigne l’arbitraire par l’absurde. La collusion de ces différentes temporalités, écrit une pata-archéologie (pas pseudo, pata), comme si La Maréchalerie avait été bâtie autour de cette pile de pont. Elle aurait toujours été là, nécessaire et évidente... On imagine sans mal que ce morceau d’autoroute conduisait au château, que sous cette pile des chevaux ont été soignés, des vernissages ont été célébrés...


Ceci n’est pas un pont, mais une habile représentation d’une pile de pont, avec son tablier, en cartonnette épaisse. Une maquette à l’échelle 1? Un prototype? Une simulation? Une représentation grandeur nature qui fait exister un pont autoroutier dans une petite maison et qui provoque une sensation d’inconfort comme si nous étions des poissons dans un aquarium, tournant autour d’une amphore en plastique. Nous sommes placés devant un décor, un faux. Le spectacle est à chercher en nous.


Sous le pont


Il se produit ici, la rencontre entre un pont autoroutier et une salle d’exposition mais quitte à placer dans une salle d’exposition un objet incongru pourquoi un pont d’autoroute et pourquoi pas une cage à lapin ou un avion ? Le pont est un objet qui appartient à l’univers du déplacement ; l’installer dans un lieu qui appartient à l’immobilité (la contemplation, l’a priori immuable des oeuvres d’art, etc.) crée un troisième lieu, un point de rencontre dont la ville serait le paysage.

Ceci n'est pas un pont...

mais une habile représentation d'une pile de pont, avec son habiter, en carton gris. Une maquette à l'échelle 1? Un prototype? Une simulation? Une représentation grandeur nature qui fait exister un pont autoroutier dans une petite maison et qui provoque une sensation d'inconfort comme si nous étions des poissons dans un aquarium, tournant autour d'une amphore en plastique. Nous sommes placés devant un décor, un faux. Le spectacle est à chercher en nous.

Didier Courbot, Sans titre, La Maréchalerie, Versailles, 2011 © , 2011 © Yann Bohac

  Didier Courbot, Avec le pont, vient l'idée de la traversée
  La Maréchalerie, Versailles
  02.02 - 02.04.2011

© ArtCatalyse / Marika Prévosto 2012. Tous droits réservés

Didier Courbot, La Maréchalerie, Versailles

Présentation de l'artiste


C'est sa double formation, l'école régionale des Beaux-arts de Dunkerque, puis l'école nationale supérieure du paysage à Versailles, qui amène l'attention de Didier Courbot à se porter essentiellement sur la dimension paysagère de l'espace public.


Il y questionne les pratiques individuelles des concepteurs et usagers de la ville en les perturbant par des interventions tout à la fois sensibles, dérisoire, inutiles, sauvages ou fonctionnelles, parfois transgressives, parfois à la limite du visible, les needs : construire un abri pour un arrêt de tramway, mettre en place un passage piéton, réparer un trottoir ou un banc public, planter des fleurs dans des espaces inattendus, arroser des végétaux naturellement implantés dans les interstices de la ville, installer un nichoir sur un réverbère...


Qu'il agisse au sein de l'espace public ou de l'espace privé, Didier Courbot cherche à créer une relation spécifique et sensible avec le paysage. Ses interventions relèvent de gestes poétiques dont l'humilité est aux antipodes de la sculpture traditionnelle. Ce qui fait sens, ce n'est plus l'oeuvre en elle-même, mais le lien entre l'action et le lieu...


Exposition du 2 février au 2 avril 2011. La Maréchalerie, 5, avenue de Sceaux - 78000 Versailles. Accès par la place des Manèges. Entrée libre du lundi au samedi de 14h à 18h et le matin sur rendez-vous. Fermé les jours fériés.