Archives expositions personnelles France
Archives expositions personnelles (C)
Le texte de Mériam Korichi
L'absente de tous bouquets
Le motif de fleur met le poète en transe incantatoire : « Je dis : une fleur ! et, hors de l’oubli où ma voix relègue aucun contour, en tant que quelque chose d’autre que les calices sus, musicalement se lève, idée rieuse ou altière, l’absente de tous bouquets. » C’est là l’actualisation d’un état poétique du langage, que décrit Mallarmé pour lequel l’activation de la parole peut être une merveille. L’opération poétique a quelque chose d’un enchantement, elle donne l’intuition d’un état quintessentiel. De fait, demande le poète, « à quoi bon la merveille de transposer un fait de nature en sa presque disparition vibratoire selon le jeu de la parole cependant, si ce n’est pour qu’en émane, sans la gêne d’un proche ou concret rappel, la notion pure ? ». Or le peintre déjoue lui aussi les proches et concrets rappels qui peuvent parasiter le rapport à la peinture pure. Cependant l’opération merveilleuse qu’active la peinture est inverse de celle de la parole : la merveille, ici, est de transposer un fait de nature en son apparition picturale qui capture une énergie visuelle qui ne se laisse réduire ou ne renvoie à aucune autre chose que l’image qu’elle est désormais pour l’éternité ; et l’enchantement ici est de se délecter d’une représentation au sujet de laquelle on ne se pose pas la question de ce qu’elle représente, car c’est évident, ce sont des fleurs. Le motif de fleur met le peintre en transe iconique.
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Gilles Aillaud
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Marika Prévosto
À
sandie hatem
jul 1 à 2h10 PM
Gilles Aillaud, Le silence sans heurt du présent
En coproduction avec les Musées des beaux-arts de Rennes et de Saint-Rémy de Provence, cette rétrospective parrainée par la Fondation d’Entreprise Michelin est la première grande exposition consacrée à l’artiste depuis 10 ans. Une cinquantaine de tableaux provenant de grandes collections publiques et privées seront exposés au FRAC Auvergne.
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Exposition du 3 septembre au 25 octobre 2016. Galerie Eva Hober, 35/37 rue Chapon - 75003 Paris. Tél.: +33 (0)1 48 04 78 68. Ouverture du mardi au samedi de 11h à 13h et de 14 h à 19h.
© ArtCatalyse / Marika Prévosto 2016. Tous droits réservés
Damien Cadio prend en charge ce mystère, en tout cas cette affirmation, de l’intensité picturale exclusive et pour poursuivre cette affirmation, pour défendre ce parti de la peinture, lance des pistes d’interprétation douteuses, joueuses, afin de mettre à distance le discours, ironisant sur l’idée d’un décryptage des images par le langage qui voudrait les éclipser sur leur propre terrain. Mais loin de les exclure, Damien Cadio accueille les mots autour de ses tableaux, il leur donne des titres grandiloquents et joue le jeu de l’arbitraire de la dénomination : quel rapport entre la chose et son nom ? Les mots s’écrivent à côté des images une fois peintes, A la charge des hommes, Toute la vie sous cutanée, Par ces maigres gestes du présent et en se passant du minéral, Encore presque obscur il n’avait pas de jalousie, Exercice de paix en temps de guerre, La nuit de l’histoire 1, La nuit de l’histoire 2, et cela continue.
Et les images peintes exhibent chardons, œillets, fleurs des champs, tête de chou plongée dans le noir, tulipes blanches, pétales écrasés et maculés de peinture noire comme du pétrole, marguerites fringantes et cependant lointaines comme surgies d’un souvenir, nature morte aux deux citrons, natures mortes aux objets ethnographiques faussaires, et cela continue. Quel rapport ? L’énigme éclate, se désintègre. Mais demeure, en deça du plaisir du jeu et de l’amusement des fausses pistes, un lien, une connexion étrange, qui ne se dit pas mais qui se montre justement, entre ces images et ces mots. Damien Cadio a eu à chaque fois l’intuition d’une corrélation précise entre ces derniers et ces premières, déjouant les pièges qu’il y a à relier un tableau à une narration ou un discours, à tout fait de langage appartenant à l’universel reportage, mais en même temps convoquant la parole par ces litanies de mots servant de titre, retrouvant dans la vision du peintre leur virtualité, celle à laquelle et avec laquelle travaille le poète justement, ces mots choisis intuitivement achevant et magnifiant l’isolement de la peinture, comme celui de la parole pure.
Damien Cadio, offrant un nouvel ensemble de peintures éloquemment intitulé Botanique du silence, poursuivant son travail sur l’image, invite à une célébration de l’impression rétinienne. Un seul motif, un seul sujet, et le lieu propre et unique, intransitif, souverain, de la peinture se déploie, qui écluse les mots, les met dehors, les laisse à l’orée de la matière faite image. La peinture gagne sa priorité sur le langage, elle qui s’affirme mutique pour chercher cette énergie visuelle pure à travers différentes phases, différents épisodes. – Voici la raison d’être d’une série ouverte sur les fleurs, dans toutes leurs variétés, formes, fleurs achetées, fleurs vues, fleurs mises en scène, fleurs cobaye …
La fleur, le motif pictural classique par excellence est ici dans tous ses états, se décline, et va continuer de se décliner. Se lève l’allégorie de la Peinture classique majestueuse qui se débarrasse de la clé d’une signification à décrypter, au profit de l’expérience d’une intensité sensorielle-visuelle nette et muette.
Damien Cadio, Série Botanique du silence
03.09 - 25.10.2016