Communiqué de presse


Séduite, autant par la qualité remarquable de son architecture que par sa situation face à la mer ou sa longue histoire tissée entre l’art et le paysage environnant, Jocelyne Alloucherie a conçu un projet spécifique pour le Musée d’art moderne André Malraux du Havre.


Depuis de nombreuses années, Jocelyne Alloucherie travaille sur une notion particulière de paysage. Elle ne l’aborde pas comme sujet en soi avec son habituelle charge de codes culturels, mais plutôt comme un reflet de notre rapport au monde, qui ouvre sur des relations fort diverses autant au sein des oeuvres que dans leur ancrage social et architectural. Ainsi, elle a été amenée à développer des configurations complexes qui proposent divers niveaux de sens et d’exploration, où images et objets se côtoient dans un parcours imaginaire mais bien incarnés dans l’espace qui les reçoit.


Depuis 2007, elle a réalisé un corpus assez étendu, regroupé sous le titre général de Climats. Il offre des séquences d’images qui sont des métaphores de vents, de bourrasques et de rafales tumultueuses. Elles transmettent la force d’un souffle fictif mais tout aussi réel. Elles portent également les traces dynamiques du geste du peintre, nous faisant osciller entre l’échelle d’un immense espace ouvert et celle plus intime du corps en action. Elle utilise le terme générique d’ « images » ne sachant plus comment nommer ces œuvres qui participent à la fois de la photographie, du dessin tout autant que de la peinture, mais qui sont finalement enregistrées en scannographie et imprimées numériquement. Cette désignation convient d’ailleurs à ces concrétions qui, malgré diverses étapes d’exécution comportant chacune une rigueur technique différente, relèvent davantage de la fiction et de l’imaginaire et se présentent au regard en toute légèreté.


Proposition pour l’espace de la nef, face à la mer, texte de Françoise Paviot


À l’hiver, la lumière solaire entre dans la salle en diagonale. Elle y forme une grille lumineuse et fine qui rythme le sol. Les ombres légères évoquent une sorte de nappe lumineuse et aquatique bien qu’en apparence immobile, car, inscrit dans le temps de la rotation terrestre, son mouvement échappe à notre perception immédiate.


C’est avec cette vision en tête que Jocelyne Alloucherie a choisi d’intervenir dans ce large espace du Musée enserré entre les oeuvres de la collection et le paysage véritable, baigné d’une lumière puissante mais toujours adoucie par la diffusion de la proximité des eaux.


Elle a imaginé une tempête de sable fictive qui aurait aussi des allures de tempête marine, une succession d’images recadrées dans l’espace par une suite horizontale de volumes sculpturaux verticaux ou horizontaux.


N’étant ni socles ni cadres, ceux-ci toutefois évoquent plutôt un brise-lames mythique ou un péristyle contemporain où le point de vue unique autant qu’univoque est mis en échec. En assumant la fonction d’une frontière entre un espace mental et un espace concret, entre un instant de contemplation et sa succession fragmentée et obligée, ces éléments deviennent des structures d’accueil et de distance.


Ils mènent au coeur de ces images tout en nous maintenant à distance, dans une conscience vive de notre propre présence inscrite dans le lieu où ils s’insèrent.

Techniquement, les images ont été réalisées à l’aide d’un sable d’origine naturelle provenant de la rive nord du fleuve Saint-Laurent et du Labrador. Il a été littéralement soufflé sur de très grandes impressions photographiques de nuages. Ces dessins précaires ont été par la suite enregistrés numériquement.


Les oeuvres sont imprimées au format 152 x 240 cm. Les structures verticales s’il y a lieu, sont à une hauteur de 245 cm. Les horizontales varient en longueur et en hauteur.


Une oeuvre et un Musée, propos de Jocelyne Alloucherie


« L’image dans sa réalité ontologique, explique Jocelyne Alloucherie, nous inclut et nous exclut tout à la fois. Et ce fort contraste de socles ou de structures architecturales les recadrant vient accentuer cette oscillation entre deux mondes qui la caractérise; cette propension de l’image à révéler et à se révéler. Les volumes horizontaux ou verticaux s’y développent de manière organique mais aussi rythmée, proposant des hauteurs et des longueurs différentes tout en conservant des proportions similaires. Les grandes vagues de sable sont des souffles, des traces de vent.

Elles évoquent aussi une masse fluide et mouvante comme un océan. Bien sûr, on peut y voir encore l’expression de quelques inquiétudes climatiques mais la structure métaphorique dont elles participent ouvre sur la possibilité d’une évocation multiple et continue. Les oeuvres se déploient comme un long déambulatoire incitant le visiteur à un déplacement, faisant sans cesse osciller sa perception et ses points de vue. Ce contrepoint exalte les qualités diverses de l’oeuvre pour entrer en affinité avec l’architecture moderniste et audacieuse du musée.

Après avoir observé les jeux de la lumière solaire dans la salle, en février dernier, j’ai pensé que les cimaises pourraient être distribuées de plusieurs façons et pas nécessairement en une ligne unique continue en contre-jour devant les grandes fenêtres donnant sur la mer. J’ai également imaginé qu’il serait bien d’y aménager des percées pour laisser la lumière naturelle entrer par moments en dialogue avec les oeuvres. Il m’a semblé heureux que le rythme des ombres au sol vienne à certaines heures s’étendre sur une partie des oeuvres, du moins sur les éléments horizontaux. J’ai souhaité aussi inscrire des ruptures qui laissent pénétrer cette lumière si variable du paysage dans l'espace de l’oeuvre. »

















 







Exposition du 17 mars au 7 mai 2012. Musée d’art moderne André Malraux, MuMa Le Havre, 2 boulevard Clémenceau - 76600 Le Havre. Tél. : +33 (0)2 35 19 62 77.  Ouverture du lundi au vendredi de 11h à 18h, samedi et dimanche de 11h à 19h.

Jocelyne Alloucherie, série Terre de sable, 2011 Impression sur toile, 152 x 247cm. Jocelyne Alloucherie, série Terre de sable, 2011 Impression sur toile, 152 x 247cm. Jocelyne Alloucherie, Poudreuses no 4, 2009 Impression numérique sur support neutre, 152 x 245 cm

Ci-dessus : Jocelyne Alloucherie, Poudreuses no 4, 2009. Impression numérique sur support neutre, 152 x 245 cm

A gauche  : Jocelyne Alloucherie, série Terre de sable, 2011 Impressions sur toile, 152 x 247cm.


Jocelyne Alloucherie au MuMa, Le Havre

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  Jocelyne Alloucherie
   MuMa, Le Havre
  17.03 - 07.05.2012